Rav Marc Arthur Drouillard
Coordonnateur Général du Mouvement Réveil Dessalinien (MORED)
Les compagnons d’armes de Dessalines le trahissent. Ils ont peur de perdre leurs privilèges. Ils veulent plus d’or, plus de pouvoir. L’homme qui les a faits libres devient leur ennemi. En le tuant, ils tuent aussi quelque chose de plus grand qu’un homme. Ils frappent au cœur de la nation.
Dessalines les avait avertis : « Si vos attitudes de trahison persistent, vous connaîtrez le sort des peuples ingrats. » Ce n’était pas une menace. C’était une vérité. Aujourd’hui, on comprend qu’il disait juste.
La trahison de 1806 ne tue pas seulement un Empereur. Elle ouvre une blessure dans le temps. Elle crée un poison lent, une habitude de trahir. Le peuple, en regardant sans agir, avale ce poison. Depuis, le pays vit dans un cercle qui ne se brise pas.
Les riches se servent. Les pauvres paient. Chaque génération recommence. Ce n’est pas une malédiction tombée du ciel. C’est une faute répétée. Une maladie que nous entretenons nous-mêmes.
Hugues Joseph le dit bien : depuis vingt-cinq ans, les dirigeants haïtiens choisissent leurs poches plutôt que leur pays. Ce n’est pas nouveau. C’est le même vieux crime. Celui de 1806.
« L’Union fait la Force » a changé de sens. Elle veut dire maintenant : « Unissons-nous pour piller plus fort. » Et ce détournement a tordu notre âme collective.
Pont-Rouge n’est pas qu’un lieu où un homme est tombé. C’est un rappel. Un cri dans le vent. Tant que nous ne regarderons pas cette faute en face, le pays restera prisonnier de son propre piège.
La guérison ne viendra pas d’une transition, ni d’un nouveau gouvernement. Elle viendra d’une révolution du cœur et de l’esprit. Il faut revenir à la source : l’idéal de Dessalines, celui de 1805.
Cette Constitution parlait de dignité, de souveraineté, d’égalité. Elle voulait une nation une et fraternelle. C’était la pierre d’angle. Nous l’avons rejetée.
Mais, comme il est dit dans le Psaume 118 verset 22: « La pierre qu’ont rejetée ceux qui bâtissaient est devenue la principale de l’angle. »
Alors, il faut rebâtir là-dessus. Sans cet idéal, rien ne tiendra. Pas un régime, pas une réforme.
La malédiction d’Haïti n’est pas dans les étoiles. Elle est dans nos choix. Reconnaître la trahison, réparer la faute, voilà la seule route vers la lumière.
Dessalines n’est pas un souvenir. Il est une boussole. Une main encore tendue.
Si nous voulons sortir du cycle, il faut saisir cette main. Et faire de la pierre rejetée le fondement de notre avenir.
Port-au-Prince, Haïti
17 octobre 2025